Histoire d’une icône – victime Notre-Dame Protectrice de l’Enfance ​

Ce texte est rédigé par un anonyme.

I – GENÈSE DE CETTE ICÔNE

En 1996, j’ai découvert, à mes dépens, les déviances d’un prêtre, réalisant soudain que les enfants pouvaient en être victimes. J’ai aussitôt averti la Supérieure Générale de la Congrégation qui l’accueillait.

Celle-ci ne m’a pas crue et m’a remise en place.

Pour pallier cette fin de non-recevoir, l’idée m’est venue d’écrire une icône de Marie, Protectrice de l’Enfance que j’ai offerte à la communauté, cette année-là, pour que les Sœurs La prient de protéger les enfants qui vivaient dans sa maison de toute maltraitance, de tout abus, de tout danger. Cette icône représente Marie, protégeant Jésus de son voile et Jésus protégeant sa Mère d’un geste tendre de la main, qui s’apprête à tracer sur son front le signe de sa Croix glorieuse, chemin de résurrection, comme pour soulager l’effroyable douleur de Celle qui assistera, impuissante, au supplice qui Lui sera infligé.

En 2011, on me la rend sans commentaire.
Je l’ai alors placée sur un mur de ma maison et L’ai priée.
Or, il s’avère que de 1996 à 2011 cette Supérieure générale puis celle qui lui a succédé ne l’avaient pas exposée à la prière … mais reléguée dans un placard !

Dans le même temps, avant même que l’Église ne condamne ce prêtre, un incendie dévastait ma maison de manière étrange. Ce fait a été considéré comme vraisemblablement d’origine criminelle, d’autant plus qu’un gaz étrange et très toxique m’a rendue si malade qu’il a fallu m’hospitaliser. Dès lors, je me suis retrouvée sans logement, sans papiers, sans travail, pétrifiée de peur…. me sentant poursuivie par ce prêtre célèbre et protégé. Le même qui, en 1997, m’avait menacée de mort, au téléphone, et priée de faire attention à mon fils, à la sortie de l’école, ce qui m’avait incitée à solliciter une protection auprès de la gendarmerie.

L’incendie avait tout dévasté … sauf l’icône de Marie, légèrement endommagée et dont les ors ont perdu leur éclat. Sur un mur où tout avait été carbonisé, Elle seule restait en place, rescapée de cette volonté de tout anéantir, comme si elle me disait :
« N’aie pas peur ! Je suis là et Je prends soin de toi. »

Par la suite je me suis cachée dans ma datcha, une petite cabane aménagée dans un bois afin d’assurer le peu de travail qu’il me restait. En effet ce prêtre puissant, ainsi que son entourage très influent, ont contribué à anéantir ma carrière. J’ai du moins emmené l’Icône avec moi.

2012 (le 23 avril)Condamnation de ce prêtre par la Congrégation de la Doctrine de la foi. Au fil des années, je n’ai cessé de m’opposer à l’omerta sur les crimes de ce prêtre soutenu constamment par un groupe d’amis ou de proches influents.

En 2021 (le 8 novembre) : jour où la Justice française établit de façon définitive la culpabilité de ce prêtre, criminel ; l’Eglise le réduit à l’état laïc le 27 septembre de l’année suivante.

II – DEUX SIGNES

m’ont invitée à redonner cette icône à la Congrégation :

  1. Une demande de mon fils, qui souhaite que je rende à la Congrégation cette Icône, témoin de mon douloureux vécu depuis ce jour où, en 1996 où j’ai dénoncé ce mal.
  2. Une demande de la Congrégation elle-même qui souhaite organiser une cérémonie de demande de pardon.

Le Seigneur qui sonde les reins et les cœurs sait et connaît ce que chacun a fait ou n’a pas fait pour voir la vérité et défendre la cause juste, On ne peut, en effet, envisager cette liturgie, on ne pourra parler de pardon que si le mal est dénoncé, défini, que si l’offense est mise en lumière, sans demi-teinte, que si la vérité est dite.

Et la vérité, c’est tout ce que le procès a révélé mais aussi ce qu’il m’a fallu endurer jusqu’à aujourd’hui pour avoir dénoncé ce mal, des années durant sans aucun compromis et sans y renoncer jamais, au prix de mes intérêts personnels : chagrin, sécurité pour moi et ma famille, emplois et ce qui en découlent, salaires, points de retraite, situation économique, essor professionnel, réputation.

III – MON SOUHAIT

Je souhaite que la prière autour de cette Icône ouvre les cœurs de ceux qui ont négligé volontairement leur devoir de secours, qui n’ont pas voulu voir la détresse dans laquelle les victimes se sont trouvées durant toutes ces années, celles et ceux qui ont contribué directement ou indirectement à l’effacement de la vérité de quelque manière que ce soit, espérant que le temps ferait oublier ce drame et toutes ses horreurs, que ces personnes demandent ENFIN pardon à celles et ceux dont la vie a été brisée ; qu’elles mesurent l’impact de leur entêtement à cacher la vérité sur toutes les victimes et leurs familles ; comme de leur maltraitance à l’égard de ceux et de celles, qui en leur âme et conscience, ont œuvré à défendre cette vérité si douloureuse à vivre mais aussi à entendre.

Autour de l’icône je souhaite que la prière s’installe : qu’elle aille par les chemins dans les paroisses, les monastères, les églises, les familles rendre compte de la souffrance, de l’inacceptable mais aussi de l’espérance du pardon, de la démarche vers la guérison, de la réconciliation dont elle a été témoin ; qu’elle serve à d’autres pour témoigner.

Durant ces longues années, si je n’ai perdu ni la Foi, ni la Vie, ni l’Espérance, si j’ai survécu à tous les sens du terme, c’est que Dieu et Marie m’ont soutenue. Même si je me sens « bancale » suite à un douloureux vécu lorsque j’étais petite – puisque j’ai été moi-même victime d’abus par deux fois à dix ans d’intervalle – abus commis par des personnes étrangères à ma famille – séquelles toujours vivaces qui m’ont rendu la vie constamment difficile –

J’ai perçu l’Amour infini de Dieu pour moi, j’ai reçu la force de son Esprit Saint qui me donne aujourd’hui le courage et le cœur de vous proposer cette icône.
Je souhaite que Marie, Protectrice de l’enfance soit honorée et priée par tous à l’intention des enfants du monde. Que leur vie intime et spirituelle, sans oublier celle des adultes vulnérables, soit protégée des pervers, des abuseurs et de ceux qui les soutiennent.

Parce que l’Amour est plus fort que la haine et la Vie plus forte que la mort, pour soutenir les plus fragiles qui abritent, en eux ou parmi eux, un enfant brisé, je tenterai d’être pour chacun l’adulte dont j’aurais tellement eu besoin à mes côtés au temps de mon enfance.

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