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Pour soutenir le Pôle Provincial :

Apporter vos compétences : nous avons besoin d’un certain nombre d’experts dans leur domaine (psychologues, psychiatres, magistrats, coaches, gestionnaires) qui interviennent à la demande ou participent plus régulièrement aux travaux du Pôle Provincial. 

Nous soutenir financièrement : le budget du Pôle Provincial n’est pour l’instant constitué que de la contribution volontaire des huit diocèses de la Province. Pour pouvoir porter un certain nombre de projets, en particulier en faveur de la formation et de la prévention, il nous faut pouvoir compter sur des appuis plus larges. Toute contribution est la bienvenue. Vous pouvez faire un don en cliquant ici.

Prier pour notre mission : Ils sont des choses que l’on ne peut obtenir que par la prière et par le jeûne. Un certain nombre de textes, de méditations, de prières sont ici proposés pour vous permettre, vous aussi, de vous unir à notre ministère de compassion et de nous soutenir dans les difficultés.

Prier

Je prie pour vous…

Je prie pour vous, victimes d’abus dont la vie a été abîmée ou détruite.

Je prie pour vous, car lorsque j’entends le récit de votre vie, je n’ai parfois rien d’autre à dire ou à faire. Face à la souffrance que vous avez vécue, au désespoir qui revient tout d’un coup et vous submerge, face à ces larmes qui coulent et que vous essayez de cacher, toute parole semble si dérisoire.

Je prie pour vous car au tremblement dans votre voix, j’entends la crainte de ceux qui parlent pour la première fois. Le récit et l’horreur de vos souffrances habitent à jamais mon cœur. Si votre voix tremble, c’est aussi de colère et de la peur de ne pas être entendus.  

Je prie pour vous car lorsque je vous vois tordre dans vos mains un pauvre mouchoir, baigné de larmes, je devine le combat intérieur où se mêlent les sentiments de honte, de culpabilité ou de révolte. Mais vous ne voulez plus et ne pouvez plus vous taire.

Je prie pour vous car je vois bien que la confiance est rompue. Vous n’avez plus confiance en l’autre et souvent plus en vous-même. Il y a si longtemps que vous avez été trahis et blessés, sans jamais pouvoir le dire. Même aujourd’hui, on vous dit : « tu devrais passer à autre chose », « tu devrais grandir », « tu devrais oublier ». Mais comment voulez-vous oublier lorsqu’on a brisé votre vie ? 

Je prie pour vous car je vois vos efforts pour vous en sortir, votre crainte de faire porter sur les autres, le poids de vos souffrances. Votre enfance a été volée, votre innocence bafouée. Pourquoi faut-il que ceux autour de vous doivent en payer, eux-aussi, le prix ?

Je prie pour vous car vous avez été abusés par ceux-là même qui vous prêchaient la miséricorde. Leurs mains, faites pour donner la grâce, ont souillé votre corps et votre âme. Ils ont sali votre innocence.

Je prie pour vous car il ne faut pas seulement que votre parole se libère : il faut aussi qu’elle soit entendue, écoutée. Longtemps, on n’a pas voulu voir. L’Église a occulté les abus et leur gravité, ajoutant à la violence déjà subie. Mais malgré les hommes, vous n’avez jamais perdu l’espoir de trouver Dieu.

Je prie pour vous parce que je suis prêtre : la prière est au cœur de mon ministère. Je reconnais dans vos peines et vos souffrances, les coups et les insultes qui frappèrent le Christ, au long de sa passion. Je vois les mêmes compromissions et reniements des Apôtres. Je vois ma lâcheté et mon aveuglement.

Oui, je prie pour vous : « Seigneur, transforme la souffrance en espérance. »

Mais oserai-je aussi vous demander de prier pour moi, pécheur ? Car c’est vous qui êtes au cœur de l’Église et au cœur de ses blessures. « Un pauvre crie : le Seigneur entend » (Ps 33) Que son cri soit un cri de douleur, de révolte ou de colère. Que son cri soit un chant de louange ou une prière : le Seigneur l’entend !

Mgr d’Arodes

© D. R.

Petit enfant qui pleure​

Le 6 novembre 2021, les évêques de France réunis en Assemblée plénière ont dévoilé une photo dans le sanctuaire de Lourdes lors d’un temps mémoriel préparé avec des victimes d’abus sexuels commis dans l’Église. Mgr Éric de Moulins-Beaufort a proposé un texte de méditation.

Petit enfant qui pleure,

Petit garçon qui t’en étais allé servir la messe, plein de fierté, petite fille qui allais te confesser le cœur plein d’espérance du pardon, jeune garçon, jeune fille, allant tout enthousiaste à l’aumônerie ou au camp scout.

Qui donc a osé souiller votre corps de ses grosses mains ? Qui a susurré à votre oreille des mots que vous ignoriez ? Qui vous a imposé cette odeur qui vous imprègne ? Qui a fait de vous sa chose, tout en prétendant être votre meilleur ami ? Qui vous a entraîné dans son secret honteux ?

Petit enfant qui, à jamais pétrifié, pleure sous les voûtes d’une cathédrale, petit enfant des centaines de milliers de fois multiplié !

Quelqu’un t’a photographié. Il permet à beaucoup de te voir, de te regarder. Quelqu’un s’est reconnu en toi, a vu en toi l’image de sa destinée brisée, ravagée. Quelqu’un, en te découvrant un jour, a trouvé en toi un frère ou une sœur grâce à qui il allait pouvoir exprimer ce qu’il portait en secret, ce que tant et tant ont porté et portent sans trouver de mots pour le dire, sans trouver, et moins encore, de cœur pour les écouter.

Petit enfant qui pleure sur un pilier d’église, là où tu devrais chanter, louer, te sentir en paix dans la maison de Dieu,

Nous te regardons. Désormais, nous passerons devant toi en te voyant, en t’écoutant. Ô enfant bafoué, enfant humilié, enfant profané qui survit au fond de tant d’adultes ou adolescent suicidé, nous voulons apprendre à te regarder et à entendre le cri muet de ta souffrance.

Petits garçons, petites filles qui pleurez cachés dans les adultes que tous voient, adolescents murés en un silence qui vous a été imposé, nous vous devons cela. Nous vous le devons sous le regard de l’humanité, sous le regard de notre conscience, sous le regard du Christ notre Seigneur, que vous vouliez chanter de toute votre âme, de tout votre être, et devant qui à jamais vous pleurez.
Il est trop tard pour que nous puissions essuyer vos larmes. Il ne l’est pas de nous souvenir de vous. Votre image placée sous nos yeux, nous voudrions qu’elle imprègne nos âmes. Désormais, je ne peux entrer dans une église, pour y célébrer le mystère de la vie et de l’amour plus forts que la mort, sans porter le stigmate de votre visage qui pleure, si pauvre, si touchant, si seul, si désemparé, et si digne surtout. Tout le bien du monde ne rachète pas les pleurs d’un enfant.

Petit enfant qui pleure, petite fille, petit garçon, adolescente, adolescent, moi, Éric, évêque de l’Église catholique, avec mes frères évêques et les prêtres et les fidèles qui le veulent bien, j’implore de Dieu en ce jour qu’il m’apprenne à vous être fraternel. « Ce que vous avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. »

Paroles de Mgr Éric de Moulins-Beaufort, Président de la Conférence des évêques de France, lors du dévoilement d’une photo dans le Sanctuaire de Lourdes le 6 novembre 2021.

Pourquoi m’as-tu abandonné ?

Très peu de vraies paroles s’échangent chaque jour. Nous ruminons les mêmes évidences et ce qui ne peut danser au bord des lèvres, s’en vient hurler au fond de l’âme. Au début, on n’en dit rien. Par pudeur, par crainte. Parce qu’on ne sait comment le dire. Parce qu’on ne le voit pas vraiment. Mais ce cri, d’abord silencieux, nous enserre peu à peu chaque jour davantage de son étreinte. Ce que l’on refuse de voir, d’entendre, d’écouter grandit dans l’invisible et prend, avec le temps, de plus en plus de force, de plus en plus de place. Au point qu’il nous étouffe ou nous asphyxie.

On tente de n’y plus prêter attention. La vie ne nous enjoint-elle pas de vivre ? Il faut continuer à lutter nous dit-on. Si tu ne le fais pas pour toi, fais-le au moins pour les autres. Dans ce combat intérieur, les forces s’épuisent vite et le chemin souvent s’interrompt. Passe à autre chose nous dit-on ! Mais nous, nous savons bien que le poison est là, qui traverse chaque jour de notre vie comme une eau sombre dans l’eau limpide. Il n’est rien de pire que la blessure de l’âme et rien ne semble pouvoir la guérir.

C’est bien là l’imposture : on voudrait nous faire croire que le combat doit s’interrompre, qu’il faut nous en accommoder. Comme si des choses faciles pouvaient anesthésier la douleur. Comme si le fait d’oublier de vivre pouvait rendre la chose plus supportable. Mais la mort n’est pas une solution et ne saurait changer une vie en destin.

Alors, on cherche d’autres solutions. On vous conseille des vitamines. On vous conseille de sortir, de rencontrer du monde. Mais le vague à l’âme ne s’accommode pas de solutions. Car si tu ne parviens pas à crier ta douleur et ta peine, tant que les paroles s’étoufferont dans ta gorge, tu resteras prisonnier. Il ne s’agit plus d’être seulement convenable ou bien élevé car la douleur de l’âme pèse plus que la souffrance du corps. Alors libère-toi, crie ta souffrance et ton espoir ! Comme quelque chose que l’on ne peut plus retenir davantage. Le moment est favorable.

Vendredi, au Golgotha, lorsque tout sera accompli, le cri du Christ en croix résonnera encore : « Eli, Eli, lama sabachthani ? » Ce cri est tellement vrai, profond, essentiel et si spontané que l’Évangéliste l’a conservé en araméen depuis plus de 2000 ans. « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Mt 27, 46) 

Comment veux tu vivre de la résurrection, sans toi-même pousser un jour le même cri ? « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » Comment peux-tu dire que Tu l’aimes si tu ne lui livres pas le fond de ton âme ? Comment pourrait-Il se pencher vers toi et te comprendre, s’Il ne perçoit d’abord ta solitude et ton besoin d’être aimé ? Cela n’a rien à voir avec une morale : c’est le simple fait d’avoir besoin de Lui pour vivre. Peut-être faut-il des années pour enfin commencer à Lui parler en vérité : notre désir, en effet, se complet dans l’errance et notre volonté est sans poids. Parfois quand même, on s’approche de quelque chose et on reçoit des nouvelles de l’Éternel. 

Car Il peut te comprendre, il peut entendre ta clameur : Lui aussi a remis son esprit et sa vie entre les mains du Père en poussant un grand cri. (Mt 27,50)

Mgr d’ARODES

Histoire d’une icône – victime Notre-Dame Protectrice de l’Enfance

I - GENÈSE DE CETTE ICÔNE 

En 1996, j’ai découvert, à mes dépens, les déviances d’un prêtre, réalisant soudain que les enfants  pouvaient en être victimes. J’ai aussitôt averti la Supérieure Générale de la Congrégation qui l’accueillait.  Celle-ci ne m’a pas crue et m’a remise en place. 

Pour pallier cette fin de non-recevoir, l’idée m’est venue d’écrire une icône de Marie, Protectrice  de l’Enfance que j’ai offerte à la communauté, cette année-là, pour que les Sœurs La prient de protéger  les enfants qui vivaient dans sa maison de toute maltraitance, de tout abus, de tout danger. Cette icône  représente Marie, protégeant Jésus de son voile et Jésus protégeant sa Mère d’un geste tendre de la main,  qui s’apprête à tracer sur son front le signe de sa Croix glorieuse, chemin de résurrection, comme pour  soulager l’effroyable douleur de Celle qui assistera, impuissante, au supplice qui Lui sera infligé.